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LETTRE XIII.

Locriens, et que tu étais assez éloigné de moi, tu te levas et vins me dire avec beaucoup de bienveillance un mot qui me réjouit fort, ainsi que le beau jeune homme [360b] placé à mon côté. Celui-ci t’ayant dit : « Vraiment, Denys, Platon te rend de grands services pour ton instruction ! — Je lui ai bien d’autres obligations, répondis-tu, et, par exemple, pour ce banquet, je ne l’ai pas eu plutôt engagé, qu’il s’est rendu tout de suite à mon invitation. » Il faut conserver cette habitude, afin que de jour en jour, nous nous devenions plus utiles l’un à l’autre. C’est dans ce dessein que je t’envoie un homme qui appartient aux Pythagoriciens et à cette école, qui pourra, je crois, vous être fort utile, [360c] à toi et à Archytas, si ce dernier est à Syracuse. Cet homme se nomme Hélicon ; il est de Cyzique, et il a eu pour maître Eudoxe dont il possède parfaitement les doctrines. Il a reçu aussi des leçons d’un disciple d’Isocrate et de Polyxène, un des amis de Bryson. Avec tout cela, chose bien rare, il ne manque pas de grâce ; il a un caractère excellent, et on ne pourrait lui reprocher [360d] que trop d’abandon et de facilité. J’hésite à parler ainsi ; car l’homme me paraît un animal, non pas méchant, mais changeant, excepté un fort petit nombre et sur un petit nombre de choses. Cette crainte et cette défiance m’ont porté à examiner moi-même Hélicon, et à consulter sur son compte ses concitoyens : ils sont tous unanimes sur son mérite. Observe-le toi-même et sois circonspect. Mais avant tout, si tu en as le temps, [360e] écoute ses leçons et apprends la philosophie. Si le temps te manque, prends toujours quelques leçons, et en les méditant plus tard, quand tu en auras le loisir, tu deviendras meilleur et l’on t’estimera davantage. Voilà comment je ne cesserai jamais de t’être utile. Mais j’en ai assez dit sur ce sujet.