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LETTRE VII.

apparence, je serai bien embarrassé. Cependant il faut peut-être souffrir encore une année et mettre en plein jour les intrigues de Denys par l’événement même. Ces réflexions faites, je déclarai le lendemain à Denys que j’étais déterminé [347c] à rester. J’ajoutai qu’il ne devait pas me regarder comme l’arbitre unique des affaires de Dion, mais le prévenir en même temps que moi de notre traité, lui demander s’il lui convenait et s’il avait quelque autre demanda, à faire. Il faut, disais-je encore, faire parvenir ces nouvelles à Dion le plus promptement possible, et en attendant ne rien changer à l’état de ses affaires. Voilà à peu près notre conversation et les conventions auxquelles nous nous arrêtâmes. Bientôt après les vaisseaux s’éloignèrent, et il ne m’aurait plus été possible de m’embarquer. C’est alors seulement que Denys, par une sorte de réminiscence, [347d] vint me dire que des biens de Dion la moitié seulement lui appartenait, et que l’autre devait rester à son fils. Il ajouta qu’il ferait opérer le partage ; qu’on vendrait la moitié des biens ; qu’il me chargerait d’en faire passer le prix à Dion, et que pour l’autre moitié, on la laisserait à son fils : que c’était ce qu’il y avait de plus juste à faire. Frappé de ces paroles, je compris bien qu’il serait ridicule de perdre un mot de plus sur cette affaire ; toutefois je dis qu’il fallait attendre la réponse de Dion et lui mander ce nouveau changement. Mais bientôt après, Denys se mit à vendre [347e] sans pudeur les biens de Dion, et régla à sa fantaisie le mode de la vente, le prix et les acheteurs, sans daigner m’en parler. Pour moi, je me tus désormais sur les affaires de Dion ; j’étais convaincu que je n’y pouvais plus rien.

Tels sont les services que j’ai pu rendre auprès de Denys à la philosophie et à mes amis. Dès ce moment, voici comment nous vécûmes, lui [348a] et moi : je portais sans