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LETTRE VII.

nous sommes [343d] toujours capables de discuter et de réfuter ces quatre principes. Mais quand nous exigeons qu’on raisonne sur le cinquième et qu’on le prouve, l’homme capable de réfuter n’a qu’à le vouloir pour vaincre, et faire croire aux auditeurs que celui qui expose ses doctrines dans ses discours, ses écrits ou ses conversations, ne sait absolument rien des choses qu’il entreprend de dire ou d’écrire ; car on ignore quelquefois que ce n’est pas l’esprit de l’écrivain ou de l’orateur qu’on réfute, mais le vice inné des quatre principes dont nous parlions. [343e] Un raisonnement exact, appuyé sur eux tous, et qui conduit et ramène à chacun d’eux, est à peine capable de produire la science ; et pour cela il faut que les choses soient naturellement bien disposées, et qu’elles tombent dans un esprit bien disposé lui-même. Mais ceux qui ont naturellement de mauvaises dispositions pour les sciences et la vertu, [344a] et l’âme de bien des hommes est dans ce triste état, ceux-là ne sauraient voir même avec les yeux de Lyncée[1]. En un mot, quand un homme n’a aucune affinité avec la chose dont il s’agit, ni la pénétration ni la mémoire n’y feront rien ; car rien ne vient sur un sol étranger. Aussi ceux qui n’ont ni affinité ni rapport avec le juste et tout ce qui est bien, quelles que soient la promptitude de leur esprit et la facilité de leur mémoire, pas plus que ceux chez qui cette affinité avec le beau et le bien s’allie à un esprit lent et à une mémoire rebelle, ne parviendront jamais à connaître toute la vérité sur la vertu [344b] et le vice ; car il faut connaître l’un et l’autre, et c’est avec beaucoup de temps et de peines qu’on peut acquérir la double science de ce qu’il y a de vrai et de ce qu’il y a de faux dans tout être,

  1. Le Scoliaste : « Lyncée, fils d’Aphérée et d’Arénée, passait pour avoir la vue si perçante qu’il voyait ce qui était sous la terre. De là le proverbe. »