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ral sur l'intérêt particulier. En second lieu, même après qu'on aurait parfaitement compris que telle est la nature des choses, si on se trouvait maître absolu dans l'État, sans avoir aucun compte à rendre à personne, il serait impossible de demeurer fidèle à cette maxime, et de maintenir constamment pendant toute sa vie la prééminence du bien public sur le bien personnel ; loin de là la nature mortelle portera toujours l'homme à désirer d'avoir plus que les autres, et à ne penser qu'à son intérêt propre, parce qu'elle fuit la douleur et poursuit le plaisir sans raison ni règle ; elle les mettra l'un et l'autre bien au dessus de la justice, et, s'aveuglant elle-même, elle se précipitera à la fin, avec l'État qu'elle gouverne, dans un abîme de malheurs. Cependant, si jamais un homme, par une destinée merveilleuse, naissait capable de remplir ces deux conditions, il n'aurait pas besoin de lois pour se conduire, parce qu'aucune loi, aucun arrangement n'est préférable à la science, et qu'il n'est point dans l'ordre que l'intelligence soit sujette et esclave de quoi que ce soit, elle qui est faite pour commander à tout, lorsqu'elle est appuyée sur la vérité et entièrement libre, comme elle doit l'être de sa nature. Par malheur, elle n'est telle aujourd'hui nulle part, si ce n'est dans un bien faible degré. A son défaut, il faut donc recourir à l'ordre et