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2° Quelle est la différence entre les mythes philosophiques et les mythes poétiques ?

Les uns et les autres sont réciproquement inférieurs sous un rapport, et supérieurs sous un autre. Le mythe poétique est supérieur en ce que personne ne peut s’y tromper, et qu’on est comme forcé d’écarter l’enveloppe pour pénétrer jusqu’à la vérité qu’il contient. Son absurdité empêche qu’on s’arrête à ce qui est apparent, et oblige à chercher la vérité cachée. Le mythe poétique est inférieur en ce que l’homme qui ne regarderait que l’apparence, et ne chercherait pas ce qui est caché au fond du mythe, serait induit en erreur; le mythe poétique peut tromper une âme sans expérience. Aussi Platon a-t-il banni Homère de sa République, à cause de cette sorte de mythes. Les jeunes gens, dit-il, ne peuvent entendre sainement de telles fables : car les jeunes gens ne savent point distinguer ce qui est allégorique de ce qui ne l’est pas, et ce qu’ils ont une fois mis dans leur mémoire est ineffaçable. Platon veut donc qu’on leur enseigne d’autres mythes. Dans les mythes philosophiques, au contraire, même en s’arrêtant aux apparences, l’esprit n’éprouve rien de très fâcheux. En effet, ces mythes supposent sous la terre des supplices, des fleuves. En admettant la lettre de ces récits, on ne tombe point dans une erreur nuisible. Mais l’infériorité de ces