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même fortifie leur amour-propre, qui ne peut s’éclairer que par des fautes, et diminuer par des connoissances acquises.

Les plus grandes affaires, celles du gouvernement ne demandent que de bons esprits ; le bel esprit y nuiroit, et les grands esprits y sont rarement nécessaires. Ils ont des inconvéniens pour la conduite, et ne sont propres qu’aux révolutions ; ils sont nés pour édifier ou pour détruire. Le génie a ses bornes et ses écarts ; la raison cultivée suffit à tout ce qui nous est nécessaire.

Si, d’un côté, il y a peu de talens si décidés pour un objet, qu’il eût été absolument impossible à celui qui en est doué de réussir dans toute autre chose ; on peut, d’un autre côté, soutenir que tout est talent ; c’est-à-dire en général, qu’avec quelque disposition naturelle, on peut, en y joignant de l’application, et sur-tout des exercices réitérés, réussir dans quelque carrière que ce puisse être. Je ne prétends avancer qu’une proposition générale ; j’excepte les vrais génies et les hommes totalement stupides, deux sortes d’êtres presqu’également rares.

On voit, par exemple, des hommes qui ne paroissent pas capables de lier deux idées ensemble, et qui cependant font au jeu les combinaisons les plus compliquées, les plus sûres et