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On ne jouit en effet de l’amitié, de l’estime, du respect et de la considération que de la part de ceux dont on est entouré, dont on est personnellement connu. Il est donc plus avantageux que la réputation soit honnête, que si elle n’étoit qu’étendue et brillante. La renommée n’est, dans bien des occasions, qu’un hommage rendu aux syllabes d’un nom.

Qu’un homme illustre se trouve au milieu de ceux qui, sans le connoître personnellement, célèbrent son nom en sa présence, il jouira avec plaisir de sa célébrité ; et s’il n’est pas tenté de se découvrir, c’est parce qu’il en a le pouvoir, et par un jeu libre de l’amour-propre. Mais s’il lui étoit absolument impossible de se faire connoître, son plaisir n’étant plus libre, peut-être sa situation seroit-elle pénible ; ce seroit presque entendre parler d’un autre que soi. On peut faire la même réflexion sur la situation contraire d’un homme dont le nom seroit dans le mépris, et qui en seroit témoin ignoré ; il ne se feroit pas connoître, et jouiroit, au milieu de son tourment, d’une sorte de consolation, qui seroit dans le rapport opposé à la peine du premier, que nous avons supposé contraint au silence.

Si l’on réduisoit la célébrité à sa valeur réelle, on lui feroit perdre bien des sectateurs. La