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donner la Bukovine. La patrie roumaine continuait pourtant de vivre au fond des âmes et ses enfants espéraient contre toute espérance. Les Bulgares enfin plus proches du pouvoir oppresseur et moins accentués comme nationalité avaient vécu les quatre derniers siècles dans une sorte de somnolence mais parmi eux les signes précurseurs du réveil prochain s’accusaient.

Tous ces peuples se trouvaient plus ou moins concentrés géographiquement. Rien de pareil pour les Hellènes. Ils étaient répandus sur tous les rivages, très vulnérables par conséquent mais insaisissables en même temps. La Grèce continentale avait infiniment souffert. À travers la Morée se remarquaient encore près des ruines des villages incendiés des monceaux d’ossements. Dans les montagnes erraient des bandes de « Klephtes », brigands romantiques qui se piquaient de belles manières et continuaient d’honorer l’hellénisme et de faire revivre les traditions homériques. C’est dans l’archipel que l’activité nationale s’affirmait. Vers le milieu du xviiie siècle, la marine grecque avait repris vigueur. Débuts modestes. Dans de petites îles, Hydra, Psara… qui jouissaient d’une liberté relative, des armateurs s’étaient équipés. La concurrence vénitienne avait cessé et les guerres européennes allaient laisser pratiquement le champ libre en Méditerranée orientale. En 1813, les Hellènes se trouvèrent posséder six cent quinze vaisseaux armés de cinq mille huit cents canons car, à cause des corsaires, tout navire de commerce en ce temps là était exposé à devoir livrer bataille. Cette flotte servait à transporter des idées et des mots d’ordre autant que des marchandises. À la société des « Philomuses »