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Messieurs,

L’homme illustre dont je viens vous parler au nom de ceux qui poursuivent en France le triomphe de ses idées — Frédéric Le Play — n’était ni un rêveur, ni un idéologue. Citoyen d’une autre nation, il se fût sans doute contenté de la culture des sciences exactes qui le captivaient à si haut point ; mais, venu au monde en 1806, il atteignait l’âge d’homme à une époque où l’ordre social se trouvait étrangement ébranlé : tout autour de lui de véritables charlatans politiques mêlés à quelques hommes sincères dont le jugement était faussé, se flattaient de pouvoir régénérer l’Europe par une organisation artificielle des sociétés… Et Le Play, inquiet avec tout le monde de voir que rien de stable ne pouvait s’établir en France, examinait avec la précision de son esprit de mathématicien ces utopies parfois séduisantes ; une à une il les prenait, les retournait, les disséquait, et, finalement, les rejetait comme ne reposant sur aucune base certaine et n’étant que des produits de l’imagination. Alors, peu à peu, l’idée se glissait en lui que certaines lois président à la formation et au développement des sociétés humaines : l’a priori inauguré par Rousseau, ces principes préconçus, ces constitutions idéales combinées dans le silence du cabinet, tout