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comme tout ce que contient cette arche sainte, qui s’appelle le Code civil ; bien plus, en abolissant les privilèges de la noblesse impériale fondée sur les ruines de l’ancienne, on a dépassé Napoléon lui-même ; les majorats de la Restauration n’ont pas vécu et rien n’est resté de solide et d’intact dans ce mouvement perpétuel de la propriété qu’engendre le partage forcé ; mouvement traduit par ce fait éloquent, qu’en moyenne la propriété française change de mains tous les dix-huit ans.

Parlant des effets que cette loi a produits en un demi-siècle, M. About a dit : « Elle a dévoré en licitations et en frais de justice une notable partie du capital acquis : elle a défait peut-être un million de fortunes au moment où elles commençaient à se faire. Le père fonde une industrie et meurt : tout est vendu et partagé ; la maison ne survit pas à son maître. Un fils a du courage et du talent ; avec sa petite part du capital paternel il fonde une autre maison, réussit, devient presque riche et meurt ; nouveau partage, nouvelle destruction ; tout est à recommencer sur nouveaux frais. L’agriculture en souffre, le commerce en souffre, le sens commun en rougit. » Voilà ses effets ; on pourrait ajouter qu’elle a fait du mariage un calcul, une spéculation, qu’elle a rendu les enfants indépendants de leur père dont le pouvoir n’a plus de sanction et qu’en les soustrayant à l’obligation de faire fortune, elle les a écartés de ces entreprises hasardeuses qui font la richesse véritable d’un pays.

Voici l’opinion de M. Renan : « Un code de lois, dit-il, qui semble avoir été fait pour un citoyen idéal, naissant