Page:Pierre de Coubertin - Souvenirs d Amerique et de Grece, 1897.djvu/76

Cette page a été validée par deux contributeurs.
69
le mouvement universitaire aux états-unis.

de ses désirs. Or, l’année même où il posait à Charlottesville la première pierre de l’université de Virginie, bien loin, dans ce qui n’était encore que le farouche et désert Far-West, les autorités du Michigan inauguraient l’université d’Ann-Arbor, et, chose étrange, les tribus indiennes, mues par un sentiment de crainte respectueuse envers la science, la dotaient de riches territoires.

On le voit, il était impossible à des établissements d’enseignement d’avoir des origines plus opposées et de recevoir des empreintes plus dissemblables. Ici, l’initiative vint d’un particulier ; là, d’une Église ; ailleurs, du gouvernement. Tout un monde séparait, moralement, le Massachusetts de la Virginie. Jefferson et Franklin, qui n’envisageaient point l’éducation sous le même angle, ne l’entendaient pas de la même façon. L’unité nationale s’est, il est vrai, consolidée ; depuis la guerre de Sécession, elle se parfait chaque jour. Néanmoins, tous ces centres scientifiques ont gardé avec le culte de leur passé le respect des traditions et, si presque tous ont progressé rapidement, leurs progrès ne se sont pas toujours accomplis dans une direction similaire. Rien ne serait plus imprudent que de juger les universités américaines en choisissant comme type deux ou trois d’entre elles et en concluant ensuite du particulier au général. Chacune a son originalité, ses spécialités et veut être étudiée dans son développement historique aussi bien que dans sa prospérité présente. Les dernières venues ne sont pas les moins intéressantes. À travers la seconde moitié de ce siècle, les fondations ont