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souvenirs d’amérique et de grèce.

au contact de la race blanche, même quand celle-ci ne lui apporte que la paix et le bien-être.

Lorsque le Mexique devint indépendant, le salaire des religieux fit défaut, ce qui ne contribua pas à les rendre républicains. Des tiraillements s’étaient produits entre eux et les militaires chargés d’assurer leur sécurité. L’élément civil avait pris parti pour les militaires ; l’œuvre se désagrégeait de toutes parts ; on sentait la sécularisation prochaine. Les Cortès l’avaient déjà demandée pendant les derniers temps de la domination espagnole : elle tarda à s’accomplir ; l’état de choses auquel elle mit fin ne subsistait plus qu’en apparence.

Les souvenirs de cette époque tranquille et poétique sont restés chers aux cœurs des Californiens ; mais je gage que du haut du ciel, où ses vertus et ses bonnes intentions l’ont certainement conduit, le Père Junipero Serra a refusé de regarder les lampions allumés en son honneur, le jour de son centenaire.

iii

La période qui s’écoula de 1810 à 1846 vit se former, sur la côte du Pacifique, une société aimablement paresseuse, élégante, naïve et brave comme les aristocraties coloniales essaimées par la vieille Espagne dans les solitudes du nouveau monde. Étant pour la plupart de sang très pur, ces Californiens méprisaient un peu la République mexicaine devenue leur mère patrie, mais ils obéissaient à ses lois sans résistance. Ce qu’ils aimaient surtout, c’étaient l’at-