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lettres olympiques.

« vénal » cher à bien des sportsmen. Jamais manifestation plus grandiose n’avait eu lieu en faveur de l’Amateurisme. D’ailleurs, ceux qui, dans les concours, reçoivent sans embarras les pièces d’or gagnées par leur endurance ou leur agilité, rougiraient, ici, de toucher cette monnaie. Dans ce cadre inoubliable, en présence des gloires écrasantes qui tombent de partout, ce paiement leur ferait horreur, Rien ne prouve mieux qu’ils sont dans le faux.

Le défilé n’était pas monotone ; la simplicité républicaine des Américains, le respect discipliné des Allemands, la grâce aisée des Français s’inscrivaient dans les attitudes, dans les gestes, dans la manière de remercier. Même contraste au point de vue social : au paysan en fustanelle arrivé premier dans la course de Marathon succédait un capitaine de cavalerie primé dans le concours de tir ; il y avait là des riches et des pauvres, des humbles et des haut placés. Le caractère démocratique était plus marqué encore l’autre jour, au déjeuner offert par le roi ; tous ceux qui de près ou de loin ont participé aux Jeux Olympiques y avaient été conviés : en tout trois cents couverts. Lorsqu’Othon le Bavarois construisit, au centre de son palais, cette vaste salle d’une architecture un peu lourde mais imposante avec ses colonnes, ses caissons, ses tribunes, il ne prévoyait pas qu’elle pût servir jamais à de pareilles agapes. Les temps ont changé. On a vu, après le repas, le roi de Grèce causer familièrement avec ses invités, allant de préférence aux plus modestes, à ceux qui s’étaient le moins attendus à cet honneur.