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lettres olympiques.

dispersée brutalement au nom d’une loi barbare, par une police mercenaire Comment ne pas songer à cela en voyant les marbres neufs, les spectateurs innombrables, les officiers aux brillants uniformes, et, pittoresquement réunies par le hasard, les coiffures tronquées des prêtres grecs, la soutane liserée de violet de l’archevêque d’Athènes et la robe blanche du Père Didon. Une seule chose est absente, que le monde civilisé ne sait plus produire, la couleur. Ni les toilettes claires des femmes, ni les galons dorés des militaires ne parviennent à rompre cet ensemble désespérément sombre où le noir domine. Ailleurs, nous n’y prendrions pas garde. Du reste, l’athlétisme moderne tient plus volontiers ses assises dans l’herbe et le feuillage : la couleur est fournie par la nature. Les organisateurs y aident en multipliant les pavois et les oriflammes, en drapant de pourpre les tribunes. Dans ce cadre où l’assistance se meut à l’aise, le drap des jaquettes et le feutre des chapeaux n’attirent pas le regard. Ici, au contraire, la ligne géométrique des gradins se prolonge indéfiniment, et ceux qui s’y entassent s’immobilisent les uns les autres Voilà qui n’était pas prévu et a causé à certains d’entre nous un instant de désillusion.

Au Vélodrome, surprise inverse. De la plaine, où il est établi, on découvre le Parnès, le Pentélique et l’Hymette ; l’Acropole pointe par-dessus les villas du nouveau Phalère ; le plus fin-de-siècle de tous les sports occupe ainsi le premier plan dans le plus classique des paysages. C’était un contraste redouté : la bicyclette au pied de Parthénon ! Que de fois n’a-