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le roman d’un rallié

sont absents ». Vilaret ne se démontait pas. « La suppression du journal, dit-il, c’est son triomphe assuré dans six mois, et quant aux ouvriers, je me charge bien d’en réunir quelques-uns ; et puis vous, le prote et moi, nous ferons au besoin la besogne à nous trois ».

À la fin de l’après-midi, le tirage était achevé. Des porteurs se partagèrent les feuilles encore humides et se répandirent par la ville. Vilaret était avec eux, ayant lui-même un ballot sur le bras ; il alla avec ostentation se poster devant la préfecture et distribua sa marchandise aux passants. Deux heures après il était arrêté et le lendemain, le Progrès républicain était supprimé. Tout cela fit grand bruit dans Rennes et le nom d’Albert Vilaret fut sur toutes les lèvres. Ses anciens camarades du Lycée se montraient fiers de lui et son ex-professeur de philosophie, un vieux libéral, ne se tenait plus de joie. Il y eût une manifestation dans la rue quand l’affaire vint devant la justice. Le tribunal fut envahi ; on échangea des coups de canne, des vitres furent brisées. Le jeune héros, calme et dédaigneux, se