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le roman d’un rallié

décerné à un autre. Il n’eut pas, d’ailleurs, l’occasion de recommencer, car son intelligence était proportionnée à son ambition et sa prééminence sur ses camarades s’affirma bientôt sans conteste. L’inspecteur primaire en fut si frappé qu’il en parla à l’inspecteur d’Académie lequel prit la peine de convaincre, lui-même, le père Vilaret que son fils irait loin et qu’on devait le faire entrer au lycée. Le fermier fit la grimace, mais céda à condition qu’il ne lui en coûterait rien. Albert entra donc au lycée de Rennes comme boursier, bien persuadé qu’il deviendrait ministre de l’Empereur et que sa femme irait aux Tuileries en robe de soie. Il n’était point méchant, ni même vaniteux et eût été plutôt tenté de s’énorgueillir de son origine plébéienne que d’en rougir. Les jours de congé, on avait peine à l’arracher à ses cahiers ; chaque été, à l’époque des vacances, il rentrait à la ferme, chargé de couronnes et de livres de prix qu’il avait lus en une semaine.

L’admiration naïve de ses frères et sœurs et la bienveillance de ses parents, tout de même un peu flattés d’avoir couvé ce bel oiseau, ne le