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le roman d’un rallié

sur Mac Pherson square. Posé en biais devant le bow window était un bureau tout surchargé de brochures, de journaux et de papiers sur lesquels une douzaine de grosses chrysanthèmes blanches et jaunes commençaient à semer leurs pétales étrangement contournées.

Étienne de Crussène posa sur un fauteuil son chapeau et ses gants, ôta son paletot et, se penchant sur les chrysanthèmes, en aspira avec délices le parfum pénétrant. Puis il s’approcha des fenêtres et regarda dehors. La nuit venait et l’automne aussi. Les arbres du square et plus loin, ceux des larges avenues dont la perspective fuyait vers le Potomac, étaient secoués par une brise rageuse. Des feuilles jaunies tournoyaient sur les trottoirs avec un bruit métallique et le ciel avait revêtu, au coucher du soleil, ces nuances criardes qui, en mer, annoncent la tempête. Le jeune homme vit, en esprit, l’immense océan roulant ses vagues profondes entre lui et sa patrie ; sa pensée se perdit un instant dans les abîmes insondés, puis aborda bientôt à l’autre rive, à cette proue de granit breton sur laquelle se bri-