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la chronique

La silhouette géographique de l’Allemagne bismarckienne ne dément pas sur ce point l’impression produite par sa physionomie politique. Étrange pays qui empiète sur ses voisins et exclue ses nationaux. Les populations des frontières sont danoises, polonaises, françaises, — mais, presque au cœur, il y a neuf millions d’Allemands qui ne pourront entrer sans que le centre de gravité se déplace et que tout l’équilibre politique ne s’en trouve ébranlé ; rien de préparé pour leur admission ; or ils appartiennent à une collectivité dont il serait sage de prévoir la désagrégation possible, même à un moment où nul symptôme précis ne l’annonce encore. Bismarck n’entend pas de cette oreille ; l’Autriche vivra telle qu’elle est parce qu’elle lui convient ainsi. Il l’a érigée en une sorte de Marche germanique afin de s’isoler, grâce à ce tampon providentiel, d’un Orient qui ne l’intéresse pas, dont il n’attend que de stériles soucis et pour lequel il ne risquera pas « les os d’un grenadier poméranien. » Par ailleurs qu’importent la race et le langage des peuples soumis ? On leur persuadera qu’ils sont Allemands et ils finiront par le croire ; on les forcera à parler allemand et ils en prendront l’habitude. En attendant, la taille et la cor-