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la chronique

malheureusement a paru passablement ridicule. Même agrémentée d’une écharpe tricolore la redingote du maire n’atteint pas au prestige sacerdotal et ni les fleurs ni les chansons ne réussissent à remplacer les cierges et l’encens.

Sera-t-on plus heureux du côté du dogme ? Les utopistes n’en doutent pas. Ils ont repris avec un entrain et une naïveté admirables le rêve de justice sociale déjà maintes fois élaboré. Ils prêchent l’évangile de la Solidarité et annoncent l’avènement d’une Humanité nouvelle, rajeunie, éclairée et purifiée. Ces idées sont nobles et pures, mais l’heure n’est guère propice. La croyance à l’égalité intrinsèque des races, fondement nécessaire d’une telle religion, a perdu la plupart de ses adhérents, et trop d’événements sont venus ébranler le dogme du progrès continu. D’autre part, ce culte des morts si profondément ancré dans l’âme Française, ne trouve plus ici sa place : l’espèce de panthéisme humanitaire substitué à la notion de la survie individuelle n’est point pour satisfaire notre race ; elle se détournera forcément de toute doctrine qui la conduirait à ce néant décevant.

L’Église laïque, en un mot, qui cherche à se créer, est une tentative mort-née. Son culte est