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lapins et de vieilles perdrix que se partagent les simples citoyens de la république et qui essuient, chaque année, avant de succomber, un nombre incommensurable de coups de fusil. Nulle apparence que cette situation se modifie ; les petits fermiers, boutiquiers, employés ne se lassent pas du plaisir que leur procure l’après-midi du dimanche passée en jambières de cuir, le fusil sur l’épaule à poursuivre dans des limites minuscules un gibier imaginaire ; tel sport — le canotage par exemple — leur procurerait un exercice plus attrayant et moins onéreux, mais cette promenade en armes flatte, à la fois, leur vanité de mâles et leur orgueil d’égalitaires : le droit de chasse a conservé quelque chose de ses allures féodales ; ils aiment en lui la victoire symbolique de la révolution sur les privilégiés de l’ancien régime. Ajoutez-y le plaisir de narrer au retour d’invraisemblables hécatombes ; car tel qui ne ment point volontiers, dès qu’il s’agit de chasse, écorche la vérité sans vergogne et sans hésitation.

Les « tireurs » sont plus sérieux. Sans être aussi nombreuses ni aussi prospères qu’il le faudrait, les sociétés de tir, sous l’habile et persévérante direction de M. D. Mérillon, ont progressé large-