Page:Pierre-Jean De Smet - voyages aux Montagnes Rocheuses.djvu/396

Cette page a été validée par deux contributeurs.
348
UNE ANNEE DE SÉJOUR

présente des marques évidentes d’anciennes éruptions volcaniques, sa marche régulière est fréquemment interrompue par des courants, par des chaînes de rochers basaltiques, et par des masses détachées de ces rochers qui obstruent le lit de la rivière. C’est sur ce grand fleuve que je m’embarquai le 30 mai. M. P. Ogden, l’un des principaux propriétaires de l’honorable Compagnie de la baie d’Hudson, m’avait offert une place dans sa berge : la politesse, la bienveillance, l’amitié que ce digne homme m’a témoignées pendant tout le voyage ne sortiront jamais de ma mémoire, et je lui en conserverai une reconnaissance éternelle. Je trouvai sa conversation si instructive, ses anecdotes et ses plaisanteries si bien assaisonnées et si pleines d’à-propos, que je le quittai avec peine et regret.

Je ne m’amuserai pas à vous décrire tous les courants, les dalles, et les cascades qu’on rencontre sur ce fleuve ; car depuis sa source jusqu’à cent cinquante milles de la mer, il ne présente qu’une succession de passages dangereux. J’essaierai toutefois de vous dire un mot de ce que les voyageurs canadiens ont appelé les grandes dalles. On désigne par le nom de dalles les endroits où le fleuve, resserré entre deux roches escarpées, forme un torrent d’autant plus impétueux que son lit est plus étroit. Dans celui dont je parle, la rivière se subdivise en plusieurs bras, séparés les uns des autres par des crêtes de rochers qui se dressent soudain à la surface de l’eau : quelques-uns de ces