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VOYAGES

protection du ciel qu’ils invoquaient, se précipitent sur les traîtres, les mettent en déroute, en tuent neuf, et en eussent tué un nombre beaucoup plus considérable, si, au fort de la poursuite, le petit-chef ne se fût souvenu que ce jour-là était un dimanche, et n’eût arrêté ses compagnons en leur criant : « Mes amis, c’est l’heure a de la prière, hâtez-vous de retourner au camp ! » À sa voix, ils abandonnent les fuyards, retournent sur leurs pas, et à peine sont-ils arrivés au camp, que, sans même songer à panser leurs blessures, ils tombent à genoux dans la poussière, pour rendre au Dieu des armées tout l’honneur de la victoire. Le petit-chef, atteint d’une balle au travers de la main droite, en avait perdu entièrement l’usage ; mais voyant deux de ses compagnons blessés plus grièvement que lui, il banda leurs plaies avec la main qui lui restait libre, et prit soin d’eux pendant toute la nuit qui suivit cette glorieuse journée.

Dans mainte autre occasion, il ne s’est montré ni moins courageux, ni moins prudent ; aussi, plusieurs fois les Nez-percés, nation beaucoup plus nombreuse que les Têtes-plates, lui ont-ils offert la dignité de grand-chef, s’il voulait passer dans leurs rangs. Il aurait pu le faire sans blesser les droits de personne, tout sauvage étant libre de quitter un chef pour passer sous un autre quand bon lui semble, à plus forte raison lorsqu’il s’agit de devenir soi-même grand-chef. Mais le petit-