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VOYAGES

à poils sur la tête, de manière à ressembler de loin aux animaux qu’il poursuit. Enfin lorsqu’il est arrivé à la portée du fusil, il doit s’embusquer dans quelque bas-fond, ou derrière un objet quelconque, afin de rester inaperçu aussi longtemps que possible. C’est alors que le chasseur tire à coup sûr. La chute d’un buffle tué et le bruit de l’arme à feu ne font qu’étonner le reste du troupeau ; le chasseur a le temps de recharger et de tirer successivement plusieurs coups, aussi longtemps que les buffles hésitent entre la surprise et la peur ; de cette manière il en abat cinq, six, et quelquefois davantage, sans changer de place. Un de nos chasseurs en tua un jour jusqu’à treize. Les sauvages croient que chez les buffles, comme chez les abeilles, chaque troupeau a sa reine, et que, lorsque la reine tombe, tout le troupeau l’environne pour la secourir ; si le fait est vrai, on conçoit que le chasseur assez heureux pour abattre la reine a ensuite beau jeu avec la multitude de ses sujets. Quand l’animal est tué, on l’accommode, c’est-à-dire, on le dépouille de sa peau, on le dépèce, on en prend les meilleurs morceaux, dont on charge sa monture ; quelquefois on ne prend que la langue, et l’on abandonne le reste à la voracité des loups. Ceux-ci ne tardent pas à se rendre au festin qui leur est préparé, à moins qu’ils n’en soient empêchés par la proximité du camp ; dans ce cas ils remettent la partie à la nuit close. Alors le voyageur novice doit renon-