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VOYAGES

constance qui est le propre des Américains, ils nous avaient quittés quelques jours seulement avant notre arrivée au Fort-Hall, dans les environs des sources d’eau thermale qui se jettent dans la Rivière-à-l’ours.

Il ne restait plus avec nous que quelques-uns de leurs gens, venus au fort pour se ravitailler. Parmi ceux-ci était le colonel B…, conducteur de la colonie, et M.W…, soi-disant diacre Méthodiste-Épiscopalien ; tous deux étaient d’un caractère fort paisible. Ils n’eurent pour nous que des égards ; mais le premier, comme tant d’autres fort indifférent en matière de religion, avait pour maxime : que le meilleur était de rien avoir aucune, ou bien de suivre celle du pays où l’on se trouve ; et pour preuve de son paradoxe, il me citait, comme un texte de saint Paul, l’ancien proverbe : Si fueris Romœ, romano vivito more. Le diacre était de son avis sur ce dernier point ; mais il voulait une religion, et bien entendu, la sienne était la meilleure ; je dis la sienne, car il en avait une à lui, n’étant ni méthodiste, ni protestant, ni catholique, pas même chrétien, prétendant que les Juifs, les Turcs, les Idolâtres, pouvaient être aussi agréables aux yeux de Dieu que tous autres. Pour prouver sa thèse (qui le croirait ?) il s’appuyait sur l’autorité de saint Paul, et en particulier sur ce texte : Unus Dominus, una fides, unum baptisma. C’est même avec ces paroles qu’il nous salua la première fois qu’il nous vit ; il les avait aussi pri-