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paraissait le plus pur et le plus favorable : « Maintenant, dit-il, ô roi, sacrifiez selon vos rites nationaux : car les miens, les voilà ! » Et il se retira pour ne pas prendre part à un sacrifice sanglant.

XXXII. Il revint après le sacrifice et fit au roi cette question : « Possédez-vous parfaitement la langue grecque, ou bien n’en savez-vous que ce qui est nécessaire à la conversation, et ne vous en servez-vous que pour être agréable aux Grecs qui peuvent vous être présentés ? — Je la sais aussi bien que celle de mon pays. Vous pouvez me dire ce que vous voudrez, car je suppose que c’est pour cela que vous m’avez adressé cette question. — Précisément. Écoutez moi donc. Le but fixé à mon voyage, c’est l’Inde. Mais je n’ai pas voulu passer par votre royaume sans m’y arrêter : car on m’avait dit que vous êtes un homme, et je le reconnais à votre ongle[1] ; d’ailleurs, je désirais connaître la science de vos mages, et m’assurer s’ils sont aussi savants qu’on le dit sur les choses divines. Pour moi, je professe la doctrine de Pythagore de Samos. J’y ai appris à honorer les dieux comme vous avez vu, à sentir leur présence, qu’ils soient visibles ou non, à m’entretenir quelquefois avec eux, et à ne porter d’autre étoffe que celle qui est faite avec des productions de la terre : ce n’est pas la dépouille d’une brebis, c’est un vêtement de lin, présent pur d’éléments purs, l’eau et la terre. C’est pour suivre les pratiques de Pythagore que je laisse croître mes cheveux, comme vous le voyez ; et c’est encore pour obéir à ses préceptes, que je garde mon corps pur de toute nourriture qui a eu vie. Je ne serai ni pour vous ni pour tout autre un compagnon de table, de plaisirs et de molle existence ; mais si

  1. Allusion à un proverbe grec : À l’ongle on reconnaît le lion.