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ménie et de l’extrémité du Taurus, et qui entourent cette province. On y trouve quelques villes, mais surtout des villages. Les populations qu’enferment ces deux fleuves sont des Arméniens et des Arabes : la plupart sont nomades ; ils s’imaginent habiter une île, à tel point que, lorsqu’ils se dirigent vers un des fleuves, ils disent qu’ils descendent à la mer : pour eux, le cercle que forment le Tigre et l’Euphrate, ce sont les bornes du monde. Cela vient de ce que ces deux fleuves, après avoir fait en quelque sorte le tour de la Mésopotamie, se jettent dans la même mer. Selon quelques auteurs, l’Euphrate se déverse en grande partie dans des marais, et va se perdre dans la terre. Selon d’autres, dont l’opinion est plus hardie, il coulerait sous terre jusqu’en Égypte, et là reparaîtrait pour mêler ses eaux à celles du Nil. Si je voulais tout dire et ne rien omettre de ce que rapporte Damis, j’aurais à raconter ce que fit Apollonius au milieu de ces Barbares : mais il me tarde d’arriver à des faits plus importants et plus merveilleux. Cependant je ne veux pas négliger de faire remarquer ici deux choses : d’abord le courage dont fit preuve Apollonius en s’aventurant ainsi à travers des nations barbares, adonnées au brigandage, et qui n’étaient pas encore soumises aux Romains ; puis la pénétration qui lui fit, à la manière des Arabes, comprendre la voix des animaux. C’est un secret qu’il apprit en voyageant parmi les Arabes, les hommes du monde qui le connaissent le mieux et savent le mieux s’en servir. Chez ce peuple, en effet, il n’est presque personne qui n’entende les oiseaux prédire l’avenir aussi bien que les devins ; on y acquiert le talent de comprendre les animaux en mangeant, selon les uns, le cœur, selon les autres, le foie d’un dragon.

XXI. Apollonius ayant passé Ctésiphon, et étant entré sur le territoire de Babylone, trouva là des gardes éta-