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maison paternelle, et dont l’un était habile à écrire vite, l’autre à bien écrire.

XIX. Apollonius, arrivé dans l’antique ville de Ninive, y vit une statue représentant une femme barbare : c’était la statue d’Io, fille d’Inachus, qui avait sur le front deux petites cornes naissantes. Comme il était arrêté en cet endroit et montrait qu’il connaissait mieux ce qui avait rapport à cette statue que les prêtres et les devins, il fut abordé par un citoyen de Ninive, nommé Damis. Nous avons déjà dit que ce Damis fut le compagnon de ses voyages, le dépositaire de toute sa philosophie, et qu’il nous a laissé sur son maître de nombreux renseignements. Il se sentit pris d’enthousiasme pour Apollonius et séduit par la perspective de ses voyages : « Partons, lui dit-il, Dieu sera votre guide, vous serez le mien. Je me flatte que vous ne vous repentirez pas de m’avoir pris pour compagnon de route. Si je ne sais rien de plus, je sais du moins le chemin de Babylone, pour en être revenu depuis peu ; je sais toutes les villes, tous les villages que nous devrons traverser, et dans lesquels nous trouverons beaucoup de bonnes choses ; je sais toutes les langues des Barbares, celle des Arméniens, celle des Mèdes, celle des Perses, celle des Cadusiens, et il n’en est aucune que je ne possède parfaitement. — Mon ami, répondit Apollonius, je sais toutes les langues, sans en avoir appris aucune. » Et comme Damis manifestait son étonnement : « Ne vous étonnez pas, ajouta Apollonius, si je comprends toutes les langues des hommes, je comprends même leur silence[1]. » En entendant ces paroles, Damis se sentit saisi d’un respect religieux pour Apollonius, qu’il considéra comme un dieu. À partir de ce moment, il s’attacha à lui, gagnant chaque jour en

  1. Voyez les Éclaircissements historiques et critiques.