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IL DÉCOUVRE UN CRIMINEL.

qui offre ce riche sacrifice n’a encore rien demandé au dieu ; il n’a pas attendu que le temps ordinaire soit écoulé ; il n’a reçu d’Esculape ni la santé, ni rien de ce qu’il doit demander : car il paraît n’être arrivé que d’hier. Et il annonce qu’il redoublera ses sacrifices et ses offrandes, si ses prières sont exaucées. C’est un homme des plus opulents : il possède en Cilicie plus de bien que tous les autres Ciliciens réunis. Il a un œil crevé, et demande au dieu de le lui rendre. » Apollonius, ayant fixé les yeux à terre, comme il en prit l’habitude dans sa vieillesse, demanda le nom du suppliant. L’ayant appris : « Ô prêtre, s’écria-t-il, il ne faut pas admettre cet homme dans le temple. C’est un impur, qui s’est attiré par ses crimes le mal dont il souffre. Ce fait même, d’avoir fait un sacrifice si magnifique avant d’avoir rien obtenu, n’est pas d’un homme qui sacrifie ; cela indique un coupable qui veut mettre sa tête à couvert du châtiment dû à ses forfaits. » La nuit suivante, Esculape apparut au prêtre, et lui dit : « Que cet homme s’en aille, et garde ses présents ; il ne mérite même pas d’avoir l’œil qui lui reste[1]. » Le prêtre prit des informations sur le Cilicien, et il apprit que sa femme avait une fille d’un premier lit, qu’il aimait cette fille, et qu’il avait eu commerce avec elle, sans même prendre la peine de cacher son infamie ; mais la femme outragée, les ayant surpris au lit, avait crevé avec son agrafe les deux yeux à sa fille et un œil à son mari.

XI. Apollonius pensait que, même dans les sacrifices et dans les offrandes qu’on fait aux dieux, il y a une certaine mesure à garder. Après l’expulsion du Cilicien, l’affluence fut encore plus grande qu’auparavant vers le temple d’Esculape. Dans ces circonstances, Apollonius dit au prêtre :

  1. Voyez les Éclaircissements historiques et critiques.