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DU PÈRE BERTHOD. [1652]

d’ormistes qui se moqueront de votre passe-port, et qui vous massacreront comme ils firent le pauvre M. Thibaut. Ainsi prenez vos mesures là-dessus, et ne me découvrez pas, car je vous donne cet avis comme à une personne que j’aime depuis longtemps. »

Le père Berthod, dès l’heure même, songe à son évasion ; il en cherche les moyens, et pour cet effet, par le moyen de madame Lozon, il envoie chercher un paysan à trois lieues de Bordeaux pour envoyer à Blaye, parce qu’il étoit extrêmement dangereux d’en prendre de la ville ni des environs, d’autant qu’ils eussent tous trahi leur père et leur frère pour un quart d’écu.

Pendant que cette dame envoie quérir son paysan, le père Berthod pense aux moyens d’écrire au duc de Saint-Simon et au sieur de Bourgon, parce que s’il écrivoit selon le chiffre qu’il avoit, et que le paysan fût pris, la lettre pourroit être vue par M. le prince de Conti, qui avoit le même chiffre, qu’on lui avoit envoyé de Paris.

Le père donc écrivit une lettre chimérique au curé de Blaye, dans laquelle, sous le nom d’un de ses oncles, il lui parloit de la résignation d’un bénéfice ; et quand la lettre eût été trouvée et le paysan pris, il n’y avoit rien à craindre, puisqu’elle ne parloit point du père Berthod ni de sa détention, et encore moins du dessein qu’il avoit de se sauver. En marge de cette lettre il y avoit : « Je vous envoie de l’eau pour les yeux. Frottez-vous-en, cela vous éclaircira la vue. » Ce paysan part avec la lettre pour le curé de Blaye et la fiole d’eau pour les yeux, avec ordre,