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DU PÈRE BERTHOD. [1652]

quelques-uns du parlement, sont attachés si fort aux intérêts de M. le prince, du prince de Conti et de madame de Longueville et du reste de leur cabale, se portent avec tant de violence contre ceux qui parlent de la paix, que les premiers bourgeois qui témoignent la souhaiter sont battus, chassés, et leurs maisons pillées et brûlées ; de sorte que ces bien intentionnés sont dans une timidité si grande qu’ils sont hors de pouvoir de rien faire, parce qu’ils n’osent se découvrir l’un à l’autre, de peur d’être maltraités par ceux de la faction des princes. Qu’ainsi vous voyez, dit Lenet au père Berthod, Bordeaux hors d’état de revenir à l’obéissance du Roi. Nous écrirons encore, dit Lenet, de notre côté à nos amis, à Paris, la même chose que vous manderez dans vos lettres. Ce que nous écrirons sera vu à la cour, on le trouvera conforme à ce que vous direz, et par là vous ferez perdre l’espérance à la Reine et à M. le cardinal de faire sortir Bordeaux des mains de M. le prince. Cette espérance étant perdue, ils traiteront avec Son Altesse ; et faisant leur accommodement par le moyen de vos lettres, qui leur ôteront l’envie de plus penser à Bordeaux, vous seul serez cause de la paix générale, puisque le roi d’Espagne ne retarde à la faire que parce que M. le prince n’a pas fait la sienne. » À ces beaux discours le père Berthod répondit qu’il aimoit mieux qu’il y eût une guerre générale que d’avoir fait cette paix en trahissant le Roi, et faisant contre son honneur et sa conscience. Après plusieurs discours sur cette matière, Lenet s’en retourna, et promit au père de revenir le lendemain pour savoir sa dernière résolution.