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MÉMOIRES

lui est naturel : « Monsieur, monsieur Bartet, si le comte Du Lude s’est plaint de vous, il y a apparence que vous lui en avez donné sujet ; et si vous lui en avez donné sujet, je pense, monsieur, monsieur Bartet, que vous devez craindre qu’il ne fasse ce qu’il a dit qu’il fera ; car il est homme de parole, et à qui il ne faut pas se jouer. »

Un autre jour, dans une grande compagnie où l’on parloit des provinciaux, l’on disoit qu’ils étoient long-temps avant que de se défaire des vices de leur terroir, et que ceux qui avoient été nourris toute leur vie à la cour avoient un terrible avantage sur eux. Bartet, prenant la parole pour tous les provinciaux, dit qu’il voudroit bien que l’on lui montrât un homme né dans la cour, et qui y auroit toujours vécu, qui osât aller disputer le terrain aux grands seigneurs des provinces comme lui, qui étoit venu d’une des extrémités de la France le disputer à la cour aux plus grands seigneurs qui y fussent. Madame Cornuel, qui étoit présente, lui répondit : « Faites qu’il y ait une cour dans chaque province, et nos courtisans iront disputer le terrain fort vaillamment ; mais n’y ayant que des brutaux et des ignorans, ils seroient bien sots de quitter la cour pour leur aller contester des choses qui n’en valent pas la peine[1]. »

  1. Bartet fut disgracié. Voici ce que Dangean en dit dans son journal manuscrit, à la date du 16 janvier 1690 : « Le Roi a permis à M. Bartet de reparoître à la cour. Il y a plus de trente ans qu’il est exilé. Il a été secrétaire du cabinet. On croit que c’est le duc de Villeroy qui a demande son retour au Roi. » Bartet mourut à Neufville, près de Lyon, chez le maréchal de Villeroy, en 1707. Il étoit plus que centenaire. (Voyez les Mémoires de Choisy, tome 2, page 205 ; Utrecht, 1727.)