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SUR CONRART.

nous reste. Aimons-nous, comme vous dites, cordialement, afin qu’au milieu d’une infinité de maux qui nous environnent, parmi tant de misères publiques, tant de déplaisirs particuliers, je trouve un asyle dans votre cœur, et que vous en trouviez un dans le mien[1]. » Conrart perdit cet ami le 18 février 1655 ; et Gilles Boileau déplora sa perte dans une élégie assez remarquable, adressée au secrétaire perpétuel de l’Académie. Elle commence par ces vers :

Conrart, Balzac est mort, · · · · · · · · · · · · · · ·
Ce mortel qui parloit le langage des dieux,
Ce mortel qu’on a vu tout brillant de lumière,
N’est maintenant qu’une ombre et qu’un peu de poussière[2].

Au moment de la mort de Balzac, Conrart étoit lui-même aux portes du tombeau. Tristan l’ermite nous apprend cette circonstance dans une ode adressée au survivant de ces deux amis. Nous en citerons quelques vers, qui nous paroissent fort au-dessus de ce que l’on connoît du poëte Tristan ; il est vrai qu’ils se terminent par l’imitation d’une pensée de Malherbe.

Noble ami de la vérité,
De qui l’esprit et le courage
Nous montrent une intégrité
Qu’on ne trouve guère en notre âge,
Conrart, à ce dernier assaut,
Où ton mal s’éleva si haut.
Nous eûmes de grandes alarmes ;
Et si cet aveu m’est permis,
Mes yeux furent trempés des larmes
Qu’on donne lors à ses amis.

  1. Lettres de Balzac à Conrart ; Elzévir, page 193.
  2. Poésies choisies, recueil de Sercy, 1658, troisième partie, page 63. Despréaux n’a point compris cette pièce dans le volume des Œuvres posthumes de son frère, qu’il publia chez Barbin en 1670.
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