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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

tir, parce qu’il n’avoit pas consulté son oracle : il n’eut pas la force d’y résister, parce qu’il n’osoit contester à M. de Bouillon une proposition de guerre. Messieurs de Beaufort, de La Mothe, de Brissac et de Bellièvre, que nous avions avertis, et qui savoient le dessous des cartes, y donnèrent avec approbation. M. d’Elbœuf s’y opposa par de méchantes raisons. Je me joignis à lui pour mieux couvrir notre jeu, en représentant à la compagnie que le parlement se pourroit plaindre de ce qu’on feroit un mouvement de cette sorte sans sa participation. M. de Bouillon me répondit d’un ton de colère qu’il y avoit plus de trois semaines que le parlement se plaignoit au contraire de ce que les généraux ni les troupes n’osoient se montrer hors des portes ; qu’il ne s’étoit point ému de leurs crieries, tant qu’il avoit cru qu’il y auroit du péril à les exposer à la campagne ; mais qu’ayant reconnu un poste où elles seroient autant en sûreté qu’à Paris, et d’où elles pourroient agir encore plus utilement, il étoit raisonnable de satisfaire le public.

Le lendemain 4 mars, les députés sortirent pour Ruel, et notre armée sortit pour le camp formé entre Marne et Seine. L’infanterie fut postée à Villejuif et à Bicêtre, la cavalerie à Vitry et à Ivry. On fit un pont de bateaux sur la rivière au Port-à-l’Anglais, défendu par des redoutes où il y avoit du canon. Ceux qui dans le parlement étoient bien intentionnés pour le parti se persuadèrent qu’elle alloit agir avec beaucoup plus de vigueur j et ceux qui étoient à la cour se figurèrent que le peuple, qui ne seroit plus échauffé par les gens de guerre, en seroit plus souple. Saint-Germain même donna dans ce panneau, et le prési-