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frayeur qui s’étoit emparée des dames de la cour, ne paroissoient l’ébranler.

Le coadjuteur, suivant toujours le plan qu’il s’étoit prescrit, se rendit auprès d’elle, eut l’air d’être effrayé du danger que couroit la famille royale, et prétendit que l’unique moyen de le détourner étoit de rendre sur-le-champ la liberté aux deux magistrats. Cette proposition révolta d’abord la Reine, qui, obligée enfin de céder aux supplications des personnes dont elle étoit entourée, annonça qu’elle exauceroit les vœux du peuple s’il se calmoit ; et chargea le coadjuteur d’aller annoncer cette grâce. Celui-ci auroit réussi avec assez de facilité à dissiper les attroupemens, sans l’impétuosité du maréchal de La Meilleraye, qui avoit voulu l’accompagner. Au milieu du tumulte, il fut maltraité par quelques hommes qui n’étoient pas dans son secret ; et il revint au Palais-Royal, convaincu qu’il avoit les droits les plus évidens à la reconnoissance et à la faveur de la Régente. Mais Anne d’Autriche, piquée de ce qu’il l’avoit forcée à une condescendance qui lui sembloit dégrader la dignité royale, ne lui fit que des remercîmens ironiques. Il rentra chez lui plein de rage, et il prétend qu’au même mement on vint l'avertir qu’il étoit question au cercle de la Reine de l’arrêter pour le conduire à Quimper-Corentin. Alors il prit le parti de lever entièrement le masque.

« Comme la manière dont j’étois poussé, dit-il, et celle dont le public étoit menacé, eurent dissipé mon scrupule, et que je crus pouvoir entreprendre avec honneur et sans être blâmé, je m’abandonnai à toutes mes pensées ; je rappelai tout ce que mon