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DU CARDINAL DE RETZ.

ce qu’il ne vouloit pas tenir. Il ne fut ni doux ni cruel, parce qu’il ne se souvenoit ni des bienfaits ni des injures. Il s’aimoit trop : ce qui est le propre des âmes lâches ; il se craignoit trop peu : ce qui est le caractère de ceux qui n’ont pas de soin de leur réputation. Il prévoyoit assez bien le mal, parce qu’il avoit souvent peur ; mais il n’y remédioit pas à proportion, parce qu’il n’avoit pas tant de prudence que de peur. Il avoit de l’esprit, de l’insinuation, de l’enjouement, des manières ; mais le vilain cœur paroissoit toujours au travers, et au point que ces qualités eurent dans l’adversité tout l’air du ridicule, et ne perdirent pas dans la prospérité tout l’air de fourberie. Il porta le filoutage dans le ministère : ce qui n’est jamais arrivé qu’à lui ; et ce filoutage faisoit que le ministère même, heureux et absolu, ne lui seyoit pas bien, et que le mépris s’y glissa : qui est la maladie la plus dangereuse d’un État, et dont la contagion se répand le plus aisément et le plus promptement du chef dans tous les membres.

Il n’est pas mal aisé de concevoir, par ce que je viens de vous dire, qu’il peut et qu’il doit y avoir eu beaucoup de contre-temps fâcheux dans une administration qui suivoit d’aussi près celle du cardinal de Richelieu, et qui en étoit aussi différente.

Vous avez vu ci-devant tout l’extérieur des quatre premières années de la régence, et je vous ai déjà même expliqué l’effet que la prison de M. de Beaufort fit d’abord dans les esprits. Il est certain qu’elle y imprima du respect pour un homme pour qui l’éclat de la pourpre n’en avoit pu donner aux particu-