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que, si je trouvois la reyne d’Angleterre disposée, comme l’on disoit, d’espouser le milord Robert Dudley, qu’elle avoit fait comte de Leicester, et advancé pour sa vertu et ses mérites, comme estant des plus accomplis gentils-hommes d’Angleterre, et qui estoit aimé et honoré d’un chascun, et que son affection fust de ce costé là, comme estoit celle de la reyne d’Escosse au milord d’Arlay, je fisse tout d’une main au nom de Leurs Majestez tout ce qu’il me seroit possible pour avancer ces deux mariages.

Estant arrivé en Angleterre, la Reyne me tesmoigna derechef qu’elle prenoit à grand honneur et faveur ce soin que Leurs Majestez avoient d’elle, tant pour luy offrir un si grand party et alliance du Roy ou du duc d’Anjou son frère, que favoriser l’affection qu’elle portoit à un sien sujet, duquel elle me parla, pour estre le plus vertueux et accompli seigneur qu’elle cogneut jamais. Puis elle me dit que de son naturel elle avoit peu d’inclination à se marier, sinon pour acquiescer a la prière et requeste de ses sujets ; adjoustant que, si le comte de Leicester estoit prince et issu de tige royale, elle consentiroit volontiers à ce party pour l’amitié que toute l’Angleterre luy portoit, mais qu’elle prioit le Roy, mon maistre, de croire que jamais elle n’espouseroit son sujet, ny le feroit son compagnon. Enfin elle fit mille remerciemens au Roy, à la Reyne sa mere, et au duc d’Anjou, de l’affection qu’ils luy portoient, laquelle elle les prioit de luy continuer ; et me remercia fort souvent de la peine que j’avois prise de la retourner voir, et des bons offices que j’avois faits, tant en l’avancement de la paix qu’à bastir cette grande et particulière amitié, qui se nourrissoit et augmentoit tous les