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Estant donc arrivé, la Reyne aussi-tost me voulut ouir ; et, m’ayant donné une favorable audience, me demanda quelle estoit l’affection du Roy, de la Reyne mere et des François vers elle, et de quelle façon la paix avoit esté reçue et publiée, où je n’oubliay rien à luy représenter au vray. Lors elle me dit qu’elle avoit meurement considéré deux choses ; la première, le désir que Leurs Majestez en France avoient eu et monstré à l’advancement de cette paix, à quoy elle desiroit de correspondre en toutes choses pour sa part, mais que ses ambassadeurs avoient du tout failly en son endroit, pour avoir suivy la generalité de leur commission, et en vertu d’icelle avoir conclu la paix sans luy en donner advis, ny avoir suivy leurs instructions particulieres ; la seconde, qu’elle ne pouvoit consentir que les ostages fussent rendus à autres conditions que celles pour lesquelles ils avoient esté baillez : chose qui luy touchoit tant à l’honneur et reputation, qu’elle ne voyoit pas comment elle pourroit sastifaire à la volonté du Roy mon maistre, qui avoit pris tous les avantages pour luy. Ce qu’ayant deduit avec plusieurs raisons, elle conclut qu’il luy vaudroit mieux demeurer avec la guerre, desavouer ses ambassadeurs et leur faire trancher la teste, pour l’avoir mise, sans l’advertir, en un traicté deshonnorable. A quoy il fut fort amplement respondu par Foix et par moy. Mais tout le discours de la Reyne n’estoit qu’artifice, dont elle estoit pleine, pour nous faire trouver bonne la paix de sa part, qui luy estoit autant ou plus utile qu’à nous.

Enfin, voyant que les discours et repliques de part et d’autre ne servoient plus de rien, elle nous dit, avec un visage fort ouvert, que puis que le Roy et la Reyne