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pescher l’Admirai et sa cavalerie d’y faire un plus grand progrès, attendant que le Roy y envoyast son armée, où peut-estre il iroit en personne, selon le conseil du duc de Guise. De façon que l’Admiral ne pourroit là ny ailleurs trouver lieu de seureté, qu’il ne fust combattu et défait, et que ce seroit le vray moyen de mettre la fin à toutes les guerres civiles de la France.

Je n’avois pas encore esté une heure et demie avec le mareschal de Brissac, qu’il arriva en diligence un chevaucheur d’escurie, qui avoit couru jour et nuict, portant la nouvelle d’une grande blessure qu’avoit eue le duc de Guise en retournant, le jour d’après que je l’eus laissé, en son logis, résolu la nuit mesme d’assaillir les isles. Il estoit accompagné de son escuyer, qui marchoit devant luy, et de Rostaing, monté sur un mulet, lorsqu’un jeune soldat, qui se disoit gentil-homme du pays d’Angoumois, appelle Jean de Meré, dit Poltrot, estant peu auparavant party de Lyon, lors occupé par les huguenots, vint trouver le duc, feignant de se rendre à luy pour servir Sa Majesté en son armée. S’estant donc mis au service de ce prince, qui recevoit volontiers ceux qui le recherchoient, et qui l’avoit fort bien traité, il espia toutes les occasions d’exécuter sa détestable entreprise. L’on disoit que ce Poltrot avoit esté nourry quelque temps en Espagne, dont il parloit le langage, et s’estoit, quelque temps auparavant, tenu au service de Soubise, où quelques-uns vouloient dire qu’il avoit prémédité son entreprise, bien que par sa confession il l’aye deschargé, et qu’estant party de Lyon il fut trouver l’Admiral, qui s’en servit comme d’un espion, et luy bailla de l’argent pour acheter un cheval. Quoy que ce soit, il suivit le duc de Guise jus-