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audit Tancarville pour assiéger ledit Havre. Car en toute la Normandie il y avoit eu tel désordre par les armées qui y avoient passé et séjourné, que toutes choses y estoient desolées, et tous les pauvres peuples au desespoir ; où les catholiques ne faisoient pas moins de mal que les Anglois et les huguenots : de sorte qu’il ne se trouvoit rien par les villages ny par les maisons, qui ne fust caché et retiré dedans des carrières longues et profondes qu’ils ont en ce pays-là, où ils sauvoient tous leurs biens et bestail et eux mesmes, comme gens sauvages désespérez ; de façon que les reistres du comte Rhingrave battoient ordinairement sept ou huit lieues de pays, pour trouver des vivres et aller aux fourrages.

Mais, pour retourner aux deux armées du Roy et des huguenots, l’Admiral, craignant le siege d’Orléans, persuada aux siens d’y aller, et les fit passer et loger en la ville, ayant pris en passant Jargeau et Sully. Alors le duc de Guise s’alla loger à quatre lieues d’Orléans par le costé de la Sologne, tellement que ces deux armées se trouvèrent voisines, ledit duc pour assaillir, et l’Admiral pour defendre : mais, après avoir demeuré quelques jours en ladite ville d’Orléans, il persuada à ses reistres, avec grande peine et difficulté, de reprendre le chemin de la Normandie pour deux raisons : l’une, pour ne se hasarder et enfermer tous en la ville d’Orléans ; l’autre, pour recevoir l’argent qui luy estoit promis d’Angleterre pour les payer, leur persuadant de laisser leurs chariots en la ville, qui demeureroient seurement et à couvert, en prendre les chevaux, pages et valets, et en faire quelques cornettes ; ce qu’ils firent à la fin, mais très mal volontiers. Cette résolution faite, il laissa d’Andelot son frere audit Orléans, pour la def-