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le vouloient entreprendre sans en avoir le commandement exprès du Roy, de la Reyne sa mère, des princes et autres du conseil privé qui estoient avec eux. Occasion pourquoy, le quatorziesme du mois, lesdits Connestable, duc de Guise, et mareschal de Sainct-André, me depeschèrent en grande diligence pour aller trouver Leurs Majestez au bois de Vincennes, et leur dire que dedans quatre ou cinq jours au plus tard ils estoient à la bataille : ce que les ennemis ne pouvoient éviter, et que les deux armées ne se rencontrassent ou en la plaine de Dreux ou de Neubourg. Parquoy lesdits sieurs demandoient un commandement exprès et absolu de Leurs Majestez avec leur conseil, de combattre ; et me baillèrent chacun une petite lettre de cette substance principale, et créance qu’ils ne vouloient rien hazarder sans ce commandement, afin que l’on ne rejettast sur eux aucune faute en affaires de telle importance, et estant si près du Roy.

Je fis ce petit voyage toute la nuit, et arrivay le lendemain de grand matin au lever de la Reyne, mère du Roy, laquelle m’ayant ouy sur ce sujet piteux et lamentable, d’estre à la veille de donner une bataille de François contre François, Sa Majesté me dit qu’elle s’esmerveilloit comme lesdits Connestable, duc de Guise et Sainct-André, estant bons capitaines, prudens et experimentez, envoy oient demander conseil à une femme et à un enfant, pleins de regret de voir les choses en telle extrémité que d’estre réduites au hasard d’une bataille civile.

Alors entra la nourrice du Roy, qui estoit huguenote ; et au mesme temps que la Reyne me menoit trouver le Roy, qui estoit encore au lit, elle reprit ce