Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 1.djvu/90

Cette page a été validée par deux contributeurs.
72
NOTICE

retiré chez Léon Sgure, auquel il s’étoit empressé de donner Eudocie ; le beau-père et le gendre furent bientôt vivement pressés par Montferrat, qui regardoit le Péloponèse comme faisant partie de son royaume : quoiqu’ils eussent une armée nombreuse, ils ne purent défendre le passage des Thermopyles, et bientôt ils ne possédèrent plus dans le pays que Napoli et la citadelle de Corinthe. Alexis n’osa s’enfermer avec son gendre dans cette dernière place : il partit secrètement, accompagné de sa femme Euphrosyne, pour aller chercher un asile près du despote d’Épire ; mais il fut surpris par les troupes de Montferrat, et conduit à Thessalonique. Baudouin et Montferrat ne voulurent ni exercer à son égard une justice rigoureuse, ni prendre contre lui des précautions cruelles qui répugnoient à leur caractère et à leurs mœurs. Ses brodequins de pourpre furent envoyés à Constantinople, et l’on décida qu’il seroit relégué en Italie. Son rôle politique n’étoit pas encore fini.

Vers le même temps, le neveu de Ville-Hardouin, portant comme lui le nom de Geoffroy, avoit eu à une des extrémités de la Grèce les aventures les plus singulières. S’étant trouvé du nombre des Croisés qui, au lieu de suivre l’expédition de Constantinople, étoient partis pour la Terre-Sainte, il s’étoit embarqué dans un port de Syrie pour revenir en France. Jeté par la tempête sur la côte de Modon, il fut accueilli par un seigneur grec, et apprit de lui, non sans la plus grande surprise, qu’un Français étoit devenu empereur d’Orient. Le jeune Ville-Hardouin, animé par cet exemple, et soutenu par son bienfaiteur, voulut acquérir par son épée le rang de prince souverain.