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SUR VILLE-HARDOUIN

tantinople pour régler l’ordre intérieur de l’Empire, nous a empêché de parler de ce qui arriva au dehors à peu près dans le même temps. Jetons d’abord un coup d’œil sur la situation des provinces.

Les seigneurs grecs, en y portant la terreur, y avoient aussi porté le mécontentement et le plus vif désir de se délivrer d’un joug qui paroissoit insupportable. Quelques-uns s’étoient déclarés indépendans dans les contrées où ils avoient quelque crédit. Le plus grand nombre avoit pris parti pour les différens chefs qui, au milieu de la ruine de leur patrie, aspiroient ouvertement à l’Empire. Théodore Lascaris paroissoit le plus puissant. Proclamé empereur dans la nuit même de la prise de Constantinople, il avoit passé le détroit, et s’étoit rendu maître d’une partie des provinces d’Asie. Michel Comnène, gouverneur de Durazzo, souffloit le feu de la révolte jusqu’au golfe de Lépante. L’Épire, l’Arcananie, l’Étolie et une partie de la Thessalie reconnoissoient son pouvoir ; et n’ayant pris d’abord que le titre de despote d’Épire, il se flattoit de parvenir au trône impérial. Alexis, petit-fils du tyran Andronic, avoit profité du désordre pour s’emparer de Trébisonde, ville grecque située sur le Pont-Euxin, près de la Colchide. L’éloignement le rendoit peu redoutable aux Français ; mais ce nouvel empire, dont les commencemens étoient si foibles, devoit survivre à l’Empire grec. Léon Sgure, que nous avons vu aspirer à la main d’Eudocie, fille de l’usurpateur Alexis, se présentoit sous un aspect plus menaçant. Possesseur d’Argos et de Corinthe, il espéroit soumettre toute la Morée, et fermer aux Français l’entrée de la presqu’île. L’u-