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SUR VILLE-HARDOUIN

Assyriens, se distribuer ces lots, évaluer les richesses qu’ils pourroient procurer, en faire des échanges, et se disputer déjà sur le partage.

Ils voulurent établir dans le palais d’un Empereur français l’étiquette minutieuse de la cour des Comnène. Les charges inutiles de chambellan, d’échanson, de sommelier, de maître d’hôtel, etc., furent confiées à des guerriers qui, peu habitués à ce genre de service, s’en acquittoient ridiculement, et dont les manières gauches excitoient la risée de l’ancienne Cour. Par un contraste singulier, ces charges, qui sembloient devoir être entièrement à la disposition du souverain, furent liées à des fiefs, et déclarées inamovibles. Ainsi l’Empereur ne fut pas même libre de choisir ceux qui l’approchoient.

Dans la distribution des dignités et des principaux fiefs, on parut obéir au vœu de l’armée. Le doge de Venise obtint le titre de despote, première dignité chez les Grecs après la dignité impériale. Ville-Hardouin fut nommé maréchal de Romanie, et Thierry de Los, son compagnon et son ami, grand-sénéchal. Le comte Louis de Blois, l’un des principaux chefs, devint duc de Nicée. On créa Guillaume de Champlitte prince d’Achaïe, et Renier de Trih, seigneur flamand, duc de Philippopoli. Ville-Hardouin, toujours désintéressé, n’eut pas d’abord un établissement aussi considérable : on lui donna les pays de Macre et de Trajanople, et l’abbaye de Vera.

Il avoit été convenu que, si l’Empereur étoit choisi parmi les Français, le patriarche seroit pris parmi les Vénitiens. Cette convention s’exécuta sans contestation du côté des vainqueurs, et sans résistance