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[1207] de la conqueste

qu’il devoit à l’empereur de Constantinople. Ayans ainsi séjourné l’espace de deux jours en cette prairie avec beaucoup de satisfaction, ils dirent que puisque Dieu leur avoit octroyé de se pouvoir trouver ensemble, qu’encores pourroient-ils faire quelque entreprise sur leurs ennemis communs. Sur cela ils prirent jour de se rassembler avec toutes leurs forces sur la fin du mois d’octobre en la prairie d’Andrinople, pour s’en aller de compagnie attaquer le roy de Bulgarie ; et là dessus se departirent fort contens, le marquis prenant le chemin de Messynople, et l’Empereur celuy de Constantinople.

256. Le marquis eut à peine séjourné cinq jours à Messynople, qu’il s’engagea, à la persuasion des Grecs du pays, de faire une course en la montagne de Rhodope, éloignée de cette ville plus d’une grande journée. Mais comme il pensoit s’en retourner, les Bulgares de ces quartiers là s’assemblérent de toutes parts, et prirent les armes, et voyans que le marquis avoit peu de gens, vinrent fondre sur son arriére-garde. Si tôt que le marquis eut oüy le bruit, il sauta promptement sur son cheval tout desarmé, la lance au poing, et vint en diligence à son arriére-garde où les ennemis s’estoient desja attachez, et leur courut sus, leur donnant la chasse bien avant. Mais le malheur voulut qu’il reçût là un coup mortel dans le gros du bras sous l’épaule, en sorte qu’il commença à jetter du sang en quantité : ce que ses gens appercevans, furent ébranlez et prirent l’épouvente, ne faisans plus leur devoir comme de coustume. Alors ceux qui estoient le plus prés de luy le soustinrent, commençant à tomber en pasmoison de la perte de son