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[1207] de la conqueste

de Bethune, Geoffroy mareschal de Champagne, et Miles de Brabans, estoient lors à Constantinople avec l’Empereur, et fort peu de trouppes. Sans differer davantage, l’Empereur vint au rivage où il monta sur un galion, et châcun en tel vaisseau qu’il pût recouvrer à la haste, faisant faire ban et cry public par la ville qu’on eût à le suivre en cette urgente necessité, pour secourir ses gens qu’il estoit en danger de perdre s’il n’alloit promptement à eux. Lors vous eussiez veu de tous costez les Venitiens, les Pisans, et autres gens de marine, courir à qui mieux mieux aux vaisseaux, et quant et eux les chevaliers françois avec leurs armes, lesquels, à mesure qu’ils s’y embarquoient, partoient du port sans attendre leurs compagnons, pour suivre l’Empereur. Ils voguérent ainsi à force de rames tant que le reste du jour dura, et la nuit suivant jusqu’au lendemain matin, peu aprés le soleil levé, que l’Empereur fit telle diligence qu’il découvrit Cibotos, et l’armée qui la siegeoit par mer et par terre. Ceux de dedans n’ayans reposé cette nuit, et estans tous jours demeurez soûs les armes, s’estoient remparez et fortifiez, tous malades et blessez qu’ils estoient, comme personnes qui n’attendoient plus que la mort. Quand l’Empereur apperçeût que ses gens qui se voyoient prés des ennemis vouloient à toute reste les attaquer, quoy qu’il n’eût encore toutes ses trouppes, n’ayant avec luy que le mareschal Geoffroy en un autre vaisseau, avec Miles de Brabans, quelques Pisans et autres chevaliers ; en sorte qu’il n’avoit en tout que dix-sept vaisseaux, tant grands que petits, où les ennemis en avoient bien soixante : et considerant d’ailleurs que s’il attendoit le reste de ses forces, et souffrît que l’on