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[1205] de la conqueste

d’autre part continuoient leurs courses jusques devant Constantinople. Henry regent de l’Empire, le duc de Venise, et Geoffroy mareschal de Champagne, estans encor à Rodosto, qui estoit esloignée de Constantinople, avisérent d’en partir, et que le duc de Venise y laisseroit garnison de Venitiens, ausquels elle appartenoit. Le lendemain ils prirent le chemin de Constantinople, marchans tousjours en corps d’armée, et vinrent à la ville de Selyvrée[1], qui en est à deux journées, et appartenoit à l’empereur Baudoüin, et où le prince son frere laissa quelques trouppes pour la garder ; de là ils s’acheminérent avec le reste jusques à Constantinople, et y furent bien receus, tout le peuple estant merveilleusement effrayé, et non sans raison, veu que de toutes leurs conquestes il ne leur restoit hors Constantinople que Rodosto et Selyvrée, le roy des Bulgares occupant tout le reste : et du costé de la Natolie au delà du détroit ils ne tenoient que le chasteau de Piga, le surplus estant soûs l’obeïssance de Theodore Lascaris.

204. Se voyans reduits à cette extremité, ils tinrent conseil, et resolurent d’envoyer à Rome vers le pape Innocent, en France, en Flandres et ailleurs pour avoir du secours. Nevelon evesque de Soissons, Nicolas de Mailly et Jean de Bliaut, furent choisis et envoyez pour cét effet : les autres demeurérent à Constantinople avec de grandes incommoditez et dans l’apprehension continuelle de perdre ce qu’ils avoient conquis, et furent en cét estat jusques à la Pentecoste. Durant lequel temps arriva un nouveau malheur à l’armée par

  1. Selyvrée, ville de Thrace sur la Propontide.