Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 1.djvu/382

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
364
[1205] de la conqueste

le mareschal luy dirent : « Sire, que voulez-vous que nous fassions ? nous sommes prests de faire tout ce qu’il vous plaira et de suivre entierement vos ordres. » A quoy il fit response : « Vous voyez bien en quel estat nous sommes, vous estes fraiz et peu fatiguez, et vos chevaux de mesme ; c’est pourquoy il me semble que vous devez faire l’arriére-garde, et moy je passeray devant afin de retenir nos gens qui sont effrayez, et qui ont grand besoin d’estre soulagez. » Ce qu’ils acceptérent volontiers, et firent l’arriére-garde avec toute sorte de bonne conduite, comme gens qui sçavoient fort bien ce mestier, estans tous bons hommes de guerre et braves chevaliers.

197. Le mareschal passa outre à la premiere trouppe dont il prit la conduite, et arrivérent à une ville appellée Charyople sur le midy : et parce que leurs chevaux estoient las et recrûs pour avoir travaillé toute la nuit, ils s’y logérent et les firent repaistre : eux mesmes y mangérent ce qu’ils y pûrent trouver, qui fut peu, s’y reposans le reste du jour jusques à la nuit. Cependant le roy de Bulgarie les suivoit toûjours à la trace, et mesmes avoit tant avancé qu’il s’estoit campé à deux lieues d’eux. La nuit estant arrivée, les nostres qui s’estoient logez dans la ville prirent les armes, et en sortirent, le mareschal faisant tousjours l’avant-garde, comme il avoit fait le jour, et ainsi cheminérent toute la nuit, tant qu’au matin ils arrivérent avec de grandes incommoditez et beaucoup de peril à la ville de Rodosto qui estoit peuplée de Grecs, place au reste opulente et tres-forte : mais ils n’eurent pas le cœur de la deffendre ;