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[1204] de la conqueste

fort blessé en la jambe ; mais à la fin ceux qui se trouvérent en cette occasion se comportérent avec tant de cœur, qu’ils eschappérent d’un peril si évident, et par l’ayde de Dieu recoignérent les ennemis à vive force dans la place. Les Grecs ne relachérent rien pour cela de l’animosité qu’ils avoient conceuë en ce temps-là contre les nostres, n’oublians aucune sorte de déloyauté pour en venir à bout. De façon que voyans les François épandus en divers endroits, chascun empesché à se deffendre en son particulier, ils s’avisérent d’une nouvelle trahison contre eux. Ils prirent en cachette des deputez de chaque ville, qu’ils envoyérent à Jean roy de Valachie et de Bulgarie, lequel les avoit travaillé de tout temps, et leur faisoit encore la guerre, offrans de le faire empereur, et de se rendre à luy, et mesme de mettre à mort tous les François ; qu’ils luy presteroient en outre serment de fidélité, et luy rendroient toute obeïssance comme à leur legitime seigneur, à condition qu’il promettroit de les maintenir et garder comme ses sujets. Ce qui fut ainsi arresté, et les sermens faits de part et d’autre.

178. Au mesme temps arriva un grand malheur à Constantinople par la mort de Hugues comte de Sainct Paul, qui avoit esté long-temps travaillé de la goutte ; laquelle causa un sensible dueil, tant aux siens qu’à ses amis qui le regretérent fort, et fut une grande perte pour les nostres. Il fut enterré tres-honorablement dans l’église de Saint George de Mangana. Il avoit possédé durant sa vie le chasteau de Didymotique, place forte et riche, où il avoit mis quelques-uns de ses chevaliers et gens de pied pour la garder : mais les Grecs qui avoient lors presté le serment au