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que pour entrer dans un cœur ou pour en sortir, je ne dépends de qui que ce soit au monde. Quelques-uns se sont imaginé que j’avais besoin du secours de la sympathie pour m’insinuer dans les cœurs, et que je m’efforcerais en vain de m’en rendre le maître si auparavant elle ne les disposait à me recevoir. C’est une vieille erreur que l’expérience détruit tous les jours ; et en effet, bien loin d’être toujours redevable de mon empire à la sympathie, c’est moi qui lui donne entrée et qui l’établis en bien des cœurs où sans moi elle ne se serait jamais rencontrée. Combien voit-on de gens dont l’humeur et l’inclination étaient tout à fait opposées, que je fais s’entr’aimer, et qui dès aussitôt que je les ai touchés changent de sentiment en faveur l’un de l’autre, viennent à aimer et à haïr les mêmes choses, et