Page:Perrault - Dialogue de l’amour et de l’amitié, 1665.djvu/36

Cette page n’a pas encore été corrigée

L’Amitié

Vous voyez cependant l’état que l’on fait de moi dans le monde : il semble que je ne sois plus bonne à rien, et parce que je n’ai point cette complaisance étudiée et cet art de flatter qu’il faut avoir pour plaire, on trouve que je dis les choses avec une naïveté ridicule et qu’en un mot je ne suis plus de ce temps-ci. Vous savez, mon frère, que je n’ai pas été toujours si méprisée, et vous m’avez vu régner autrefois sur la terre avec un empire aussi grand et aussi absolu que le vôtre. Il n’était rien alors que l’on ne fît pour moi, rien que l’on ne crût m’être dû, et rien que l’on osât me refuser : l’on faisait gloire de me donner toutes choses, et même de mourir pour moi si l’on croyait que je le voulusse ; et je